Certains bibliothécaires rêvent de normes de catalogage stables, définitives, complètes, intangibles… mais il s'agit bien là d'un rêve, d'une utopie qui ne correspond pas à la réalité. De nos jours, non seulement les règles de catalogage doivent être régulièrement révisées pour être en cohérence avec les recommandations ou les normes internationales mais aussi, depuis quelques années, pour suivre le rythme de leur évolution qui va en s'accentuant sous la pression des évolutions technologiques, avec l'apparition ou le développement de nouveaux supports, à cause de la nature même des publications (multimédia), des besoins nouveaux et de nouveaux utilisateurs.
Au cours de notre exposé nous soulignerons le rôle joué par la Bibliothèque nationale de France (BnF) dans le domaine normatif.
AFNOR
L'AFNOR (Association française de normalisation), a été créée en 1926 pour promouvoir et coordonner les travaux de normalisation dans tous les secteurs d'activités (agro-alimentaire, industriel, hygiène, sécurité, sports, etc..) et a été globalement réorganisée en 1984. Elle a, dès ses origines, été chargée de s'occuper de normaliser dans le domaine des publications. C'est donc une spécificité française par rapport à de nombreux pays où l'élaboration des normes de catalogage est du ressort soit des associations de bibliothécaires soit d'organismes
chargés de l'harmonisation du catalogage dans les bibliothèques et non pas d'un organisme de normalisation généraliste. Je souligne ce point car cela signifie que l'élaboration d'une norme de catalogage doit obligatoirement suivre les étapes et procédures imposées par l'AFNOR à tout type de norme.
L'AFNOR est membre actif de l'ISO (International organization for standardization) et, au niveau européen, du CEN (Comité européen de normalisation). A ce titre elle est en lien constant avec ces deux organismes et diffuse leurs documents. Elle est naturellement aussi en lien avec l'IFLA pour tout ce qui concerne la description des documents.
Les normes de catalogage (normes sur les accès et sur les descriptions bibliographiques) sont élaborées dans le cadre de la Commission générale Information et documentation CG 46 (équivalent national à l'AFNOR du TC 46 de l'ISO), et en son sein dans la CN 3 Commission de normalisation Modélisation conceptuelle des données. Il faut souligner que cette appellation "modélisation conceptuelle des données" date de 1996, correspond à une restructuration des groupes de travail pour une meilleure prise en compte des nouvelles technologies. Cette nouvelle organisation est "pionnière" sur le plan international mais a reçu l'accord de l'ISO.
Une autre commission s'occupe de la numérotation et de l'identification des documents.
Les groupes de travail chargés de l'élaboration des normes - ou de la transposition de normes internationales en normes nationales - comprend toujours des représentants de tous les types de bibliothèques : BnF, bibliothèques universitaires, bibliothèques spécialisées, bibliothèques municipales, bibliothèques départementales de prêt (bibliobus), et, si nécessaire, autres types d'établissements.
La panoplie actuelle des normes de catalogage
Lorsqu'on parle de normes de catalogage on pense immédiatement aux normes de description bibliographique des documents issues des ISBD, mais il faut y adjoindre les normes concernant :
sans parler des formats, qui sont une structuration des données pour le traitement en machine, et dont nous ne traiterons pas aujourd'hui.
Jusqu'à présent les normes de description bibliographique sont la transposition en normes nationales des ISBD. Le tableau que nous présentons récapitule les normes françaises existantes, nous n'allons pas les passer en revue. Nous souhaitons seulement souligner trois particularités :
exemple : Islande
jusqu'en 1918 | indépendance du Danemark | ISLKD |
de 1918 à 1940 | Royaume en union personnelle avec le Danemark | ISLKE |
de 1940 à 1944 | occupation alliée | ISLQN |
depuis 1944 | Indépendance | Voir norme ISO 3166 |
Ces codes présentent un intérêt particulier pour les notices d'autorité de collectivités territoriales. Ils ne sont pas réservés aux bibliothèques.
Le travail, en remontant dans le temps, se poursuit pour la période immédiatement antérieure. Et, de son côté la BnF actuellement essaie de mettre au point des codes de pays pour :
qui puissent répondre aux besoins, parfois contradictoires, des catalogueurs décrivant des livres, des manuscrits, des monnaies, des cartes qui vont dans un avenir proche travailler dans une unique base de données multimédia multi-supports.
Il existe plusieurs manuels de catalogage, à fins pédagogiques. Mais paradoxalement, l'instrument de travail le plus précis légiférant sur les points peu développés dans les normes ou absents de celles-ci, n'a pas une grande diffusion nationale : il s'agit du Guide pratique du catalogueur : règles de saisie dans la base BN-OPALE (c'est-à-dire la base de la BnF) qui conjugue normes, formats INTERMARC et saisie dans un système informatique particulier. De plus ce guide présente la particularité d'être une publication à feuillets mobiles qui est alimentée au fur et à mesure des besoins et, donc, ne traite que des cas complexes ou de problèmes d'interprétation des normes. Là où les normes sont suffisantes ce guide est muet.
Quelques mots sur le processus d'élaboration : dans chacun des services de catalogage de la BnF les questions et problèmes des catalogueurs remontent au "correspondant de normalisation" qui, s'il ne peut résoudre la question avec l'arsenal normatif en vigueur, se fait le porte-parole de ses collègues dans des réunions transverses régulières (actuellement tous les deux mois). Il est alors décidé de l'opportunité ou non de rédiger des pages du Guide par le service de la normalisation, ou après instruction de la question dans un groupe de travail d'experts qui sont déterminés en fonction de la question à traiter. Avant diffusion auprès de l'ensemble des catalogueurs de la base (près de 353 personnes de la BnF et 68 dans les bibliothèques connectées), une première rédaction des nouvelles pages du Guide est soumise à la critique des personnes chargées de l'encadrement des catalogueurs. Chaque année, une nouvelle table des matières et un nouvel index alphabétique prend en compte les pages publiées pendant l'année.
A titre d'exemple, le traitement des monographies en plusieurs volumes fait l'objet de 55 pages d'explications et celui des microformes 23 (distinction entre microfiches éditées et microfiches de substitution pour des documents dont l'état ne permet plus la communication, entre la matrice et les exemplaires diazoïques, etc…)
Actuellement l'élaboration d'un guide du catalogueur "en ligne" dans BN-OPALE PLUS est à l'étude, avec, si possible, des liens hypertextuels.
Travaux normatifs programmés à l'AFNOR
Parmi les normes et révisions de normes déjà programmées pour les années à venir, je ne vais parler que de celles qui présentent une intérêt dans un lieu où nous sommes en train de confronter les pratiques de différents pays européens.
Pour les auteurs personnes physiques, les gestionnaires d'autorité de la BnF souhaitent, d'une part, introduire systématiquement les dates biographiques dans les vedettes (et non plus seulement pour distinguer les homonymes) et, d'autre part, traiter de manière approfondie la question des titres nobiliaires, des noms de terre et patronymes qui sont extrêmement nombreux dans les catalogues de la BnF et des diverses bibliothèques possédant des fonds anciens patrimoniaux, issus des confiscations au moment de la Révolution française.
Il nous semble que c'est typiquement un domaine dans lequel les pays européens pourraient collaborer pour élaborer un instrument de travail qui prendrait en compte la réalité historique de nos pays. Nous savons bien qu'une telle initiative ne peut venir d'Outre-Atlantique, ce genre de problème n'intéresse absolument pas nos collègues américains parce que cela ne fait pas partie de leur culture. La preuve que c'est précisément un point sur lequel achope le d'autorités communes entre les USA le Canada et la Grande-Bretagne. Les choix de la structuration des vedette auteurs, pour ce genre de noms, ne peut venir que des pays concernés, un récapitulatif des pratiques nationales de catalogage en ce domaine et un consensus s'il y a des point de divergences ne peut être que l'aboutissement d'un travail commun.
+ une présentation historique de l'évolution des livres liturgiques
+ une liste des rites avec leurs diverses dénominations
+ un glossaire développé de tous les termes spécialisés utiles aux catalogueurs
+ une liste des diocèses français anciens et modernes
+ une liste des langues du monde dans lesquelles il existe des traductions d'ouvrages liturgiques
+ un calendrier liturgique commenté
+ une bibliographie sur les ordres religieux, accompagnée d'une méthodologie de recherche.
Comme vous pouvez le constater, ce projet rejoint en partie le projet italien ACOLIT (Autori Cattolici e Opere LITurgiche), nous aurons l'occasion de le présenter plus en détail le mois prochain à l'Association des bibliothécaires ecclésiastiques italiens et de confronter nos résultats respectifs. Il est d'ailleurs dommage que nos contacts n'ont été que très tardifs.
"Functionnal requirements" et normes de catalogage.
Le rapport final du groupe qui a travaillé sur les "Functionnal requirements" a été approuvé au congrès de l'IFLA à Copenhague en 1997, le texte a été publié par Saür en 1998. Cette approche complètement nouvelle des œuvres va sans aucun doute bouleversé fortement les pratiques de catalogage. Mais à quelle échéance ? Telles est la question : d'une part, la majorité des catalogueurs n'est pas préparée à de tels changements, d'autre part, les millions de notices existantes en ISBD dans nos catalogues représentent un existant dont on ne peut faire abstraction au moment où des opérations importantes de conversion rétrospective sont en cours ou en voie d'achèvement.
C'est, par conséquent, sous la pression de besoins nouveaux et de l'adéquation – ou non adéquation – de l'analyse des "Functionnal requirements" à faire surgir des solutions que les changements se feront dans un avenir proche.
Voici à titre d'exemple, un cas très concret posé au service de la normalisation de la BnF tout récemment.
Traitement des spectacles
Le Département des arts du spectacle de la BnF qui, comme son nom l'indique, conserve un fonds très spécialisé, a souhaité, il y a quelques années, pouvoir établir un lien entre les différentes notices décrivant des documents concernant un même spectacle (texte de la pièce, affiche, programme, croquis de mise en scène, etc…) chacun de ses documents étant décrit selon l'ISBD correspondant à sa nature. Il avait été alors décidé, en l'absence de tout texte international dans ce domaine, de créer un nouveau type de notice bibliographique "notice de spectacle" (et une structure INTERMARC équivalente) destinée à décrire non pas un document mais le spectacle et en y faisant figurer tous les éléments permettant de l'identifier : titre, metteur en scène, date et lieu de création, etc… Dans la base de données cette notice fédère donc, grâce aux liens multiples, toutes les notices de description bibliographique.
Récemment la question de l'opportunité d'une notice d'autorité pour identifier un spectacle et, par voie de conséquence, gérer les différents documents le concernant, s'est posée. Au cours des discussions entre catalogueurs de spécialités très différentes, il est apparu que la notion même d'œuvre n'était pas la même pour tous les participants, et ce en fonction du type de documents qu'ils avaient l'habitude de cataloguer. C'est là que les "Functionnal requirements" peuvent sans aucun doute apporter des éléments précieux pour la réflexion puis qu'ils distinguent l'œuvre ("work"), c'est-à-dire la création intellectuelle, ses "expressions" ou réalisations intellectuelles/ artistiques et ses "manifestations" ou matérialisations.
L'avenir nous dira si nous savons avoir recours aux concepts des "Functionnal requirements" pour aborder autrement les questions de catalogage, mais ce qui est sûr c'est qu'ils nous forcent à nous tourner vers le future plutôt que vers le passé… Une évolution des esprits est sans doute nécessaire comme première étape, y sommes-nous prêts ? Je suis personnellement convaincu que les notices autorités auront un rôle de plus en plus grand à jouer car elles sont la garantie de la cohérence des points d'accès et la véritable valeur ajoutée aux notices bibliographiques.
Normes existantes :
Domaine |
Norme ou recommandation internationale |
Norme AFNOR avec date d'approbation du texte définitif |
Observations |
Description bibliographique |
IFLA |
||
monographies |
ISBD (M), 1987 |
Z 44-050 (1989) |
|
publications en série |
ISBD (S), 1988 |
Z 44-063 (1999) |
décalage avec l'ISBD |
livres anciens |
ISBD (A) |
Z 44-074 (1986) |
révision prévue |
images fixes |
ISBD (NBM), 1987 |
Z 44-077 (1997) |
|
vidéogrammes (images animées) |
ISBD (NBM), 1987 |
Z 44-065 (1998) |
remplace éd. de 1980 |
musique imprimée |
ISBD (PM), 1991 |
Z 44-069 (1993) |
|
enregistrements sonores |
ISBD (NBM), 1987 |
Z 44-066 ( 1988) |
remplace éd. de 1980 |
documents cartographiques |
ISBD (CM), 1987 |
Z 44-067 (1991) |
|
ressources électroniques |
ISBD (ER), 1997 |
Z 44-082 (1999) |
- élaborée en même temps que l'ISBD (ER) 1997 - enquête publique 1998 - homologation janvier 1999 |
Domaine |
Norme ou recommandation internationale |
Norme AFNOR |
Observations |
Accès |
|||
choix des accès |
- |
Z 44-059 (1987) |
|
forme et structure des vedettes noms de personnes, vedettes titres, des rubriques de classement et des titres forgés |
pas de norme internationale |
Z 44-061 (1986) |
révision programmée avec éclatement en 2 normes : - une pour les noms de personnes - une autre pour les titres |
classement des noms propres étrangers comportant des particules ou d'autres éléments accessoires |
prend en compte les usages nationaux des différents pays (Europe, Amérique du Nord et du Sud) |
Z 44-062 (1963) |
|
forme et structure des vedettes de collectivités-auteurs |
IFLA Form and structure of corporate headings (1980) + Report from the review group on form and structure of corporate headings (in ICBC oct.-dec. 1992) Actuellement groupe de travail IFLA pour une éventuelle révision du texte de 1980 à la demande des Pays-Bas |
Z 44-060 (1996) |
a remplacé l'éd. de 1983 modifications sur les qualificatifs essentiellement
La France n'est pas favorable à une remise en cause du texte IFLA de 1980 qui, globalement donne satisfaction |
Forme et structure des vedettes titres musicaux |
à la date de sa publication il n'existait pas de travaux européens ou internationaux sur le sujet |
Z 44-079 (1993) |
révision vient d'être inscrite au programme de l'AFNOR pour l'an 1999-2000 |
Forme et structure des noms géographiques |
Z 44-081 ( 1993) |